PROXIMO Revue de presse 13 09 2017

L'economiste

Villes logistiques intégrées/Logintek: A quand le statut de zone franche?

  • Zinafrik attend le verdict de l’Administration centrale
  • Le groupe a investi 800 millions de DH à Sidi Laidi
  • 95% des travaux in situ sont réalisés avec un retard au niveau des ouvrages hors site

Logintek Casablanca, premier-né d’un ambitieux programme d’investissement de 15 milliards de DH à l’horizon 2030, verra-t-il bientôt le bout du tunnel? Le management de Zinafrik Développement, promoteur privé de ce projet visant la création du 1er réseau national de villes et zones logistiques multi-flux intégrés, retient sou souffle. Le projet est suspendu à une décision gouvernementale relative à l’octroi du statut de zone franche à cette plateforme.

«Nous avons tenu des réunions avec le chef de gouvernement et le ministre de l’Industrie et du Commerce. Nous restons confiants», soutient Samir FilaliChahad, PDG du groupe. Si le projet aboutit, ce sera la première zone franche gérée par le privé. Ce qui ouvrira la porte à d’autres investisseurs.

A défaut, «je suis prêt à céder Logintek Casablanca à L’Etat et arrêter tous les autres projets annoncés dans le cadre de ce programme d’investissement avant de me tourner vers l’Afrique où nous sommes sollicités par une dizaine de pays», affirme FilaliChahad.

Lourdeurs administratives, bureaucratie chez la Commune… le management en aura tout vu. Ce qui remet sur le tapis les difficultés rencontrées par les investisseurs privés lors de la réalisation de leurs projets. Un vrai parcours du combattant. Espérons que le dernier discours royal aura l’effet escompté.

Côté financement, Zinafrik est en train de négocier un prêt avec un organisme international. «Nous sommes à un stade avancé au niveau des discussions avec les bailleurs de fonds, soit via une entrée dans le capital ou l’endettement», confie le PDG. «J’espère que le gouvernement se penche sérieusement sur le financement et ce, pour un meilleur accompagnement des opérateurs privés», insiste Filali.

Annoncé en 2014, le projet Logintek Casablanca, sis à Sidi Laidi, près de Settat, a connu du retard au niveau des travaux hors site. C’est surtout le raccordement au réseau routier qui a été ajourné. Cette péripétie a coûté à Zinafrik Développement le désistement du client qu’est l’italien VFI, qui voulait y implanter une usine de délavage biologique et écologique. «Depuis 2015, nous sommes en train de batailler pour que le projet soit raccordé à la voie nationale n°9.

Il a fallu l’intervention du gouverneur pour débloquer la situation suite au blocage imposé par le président de la commune. Depuis, un travail colossal a été réalisé par les pouvoirs publics», fait valoir le PDG du groupe. «Actuellement, nous sommes à 95% des travaux de viabilisation in sit. Pour le hors site, les travaux démarrent en ce mois de septembre» ajoute-t-il.

Les premières usines verront le jour début 2018 et devront être opérationnelles à partir du premier trimestre. De même que la première tranche de la technopole. La seconde tranche de la ZI sera livrée en 2019, précise l’aménageur-développeur. Plusieurs industriels de l’automobile, de l’aéronautique, de l’agro-alimentaire, du BTP et autres secteurs d’activités ont manifesté leur intérêt pour s’implanter au sein de Logintek, à Sidi Laidi.

Pour mettre en relief son côté eco-green, le groupe a opté pour des solutions d’éclairage combinant le solaire et l’éolien. Par ailleurs, un centre de formation dédié aux énergies renouvelables et à la logistique sera érigé au sein de la nouvelle ville sur un terrain de 3.400 m².

Ville multimodale

Les activités prévues au sein de Logintek Casablanca devraient permettre la création de 10.000 à 13.000 emplois directs. Cette plateforme se veut une ville intelligente et intégrée. Elle propose sept composantes pour les multinationales, les PME/PMI, les commerçants ainsi que les habitants. Elle englobe une zone industrielle multimodale, un parking TIR sécurisé 24h/24 et 7j/7, une technopole «Loginpark» ainsi qu’une offre résidentielle. Pour une prise en charge efficace des démarches administratives liées à l’implantation et à la gestion opérationnelle des entreprises, un guichet unique ainsi qu’une société de gestion offrant tous les services de facility management sont prévus au cœur du site. Pour plus de compétitivité, le groupe vise à mettre en place des indicateurs de performances logistiques et arriver à réduire à 2h la durée du traitement des dossiers au niveau du guichet unique.

Audit des projets financés par le Fonds de développement rural

146 programmes du ministère de l’Urbanisme ciblés

Le suivi ne serait pas toujours assuré, relevait déjà la Cour des comptes

Les programmes conventionnés et financés par le Fonds pour le développement rural et des montagnes, dont l’ordonnateur depuis 2016 est le ministre de l’Agriculture, seront audités. L’adjudicataire du marché sera connu jeudi 12 octobre. Cet audit se concentrera uniquement sur les projets du ministère de l’Aménagement du territoire, de l’urbanisme, de l’habitat et de la politique de la ville.

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Une convention conclue en octobre 2008 affecte 60% des ressources du Fonds aux projets agricoles dans les zones irriguées, pluviales, pastorales et montagneuses. Le reste est destiné au soutien des projets visant la promotion des territoires et leur accompagnement.  Sauf qu’un téléscopage de compétences a été constaté sur le terrain notamment de la part du ministère de l’Urbanisme.

  La Cour des comptes parle de «contribution au financement de plusieurs actions relevant plutôt du secteur de l’Agriculture» (Cf. L’Economiste N°5010 du 25/04/2017). C’est le cas pour le projet de sensibilisation sur les intérêts socio-économiques de la création des groupements Anoc (association nationale ovine et caprine) pour la sélection des troupeaux de race Sardi.

Plus de 800 projets de développement intégrés répartis sur 146 programmes conventionnés ont été financés par le ministère de l’Urbanisme entre 2009-2016. Ils sont répartis en quatre groupes. Le premier compte des projets sélectionnés à partir des études et stratégies élaborées par l’Aménagement du territoire, les agences de développement, l’INDH et stratégies sectorielles.

Le deuxième compte 62 programmes et le troisième encourage l’émergence de projets émanant des territoires ruraux. A ce niveau, le département de l’Urbanisme a recouru aux appels à projets en vue de soutenir l’initiative des acteurs locaux. Suite à cette procédure, 56 programmes ont été lancés.

Le quatrième paquet de programmes d’investissement s’est concentré sur deux projets de développement au niveau provincial. Aujourd’hui, les 146 programmes seront «examinés» de près: modalités et  conditions d’exécution des conventions, conformité de l’utilisation des ressources financières, écarts entre les ressources mobilisées, celles engagées et réellement encaissées…

Le contrôle du Fonds de développement rural effectué par la Cour des comptes avait relevé des dysfonctionnements dont le  renouvellement des conventions par le ministère de l’Urbanisme indépendamment des résultats des projets et sans évaluation. La cour avait également relevé l’inadaptation des conventions aux spécificités de chaque domaine ou nature d’action. De plus, le suivi des projets réalisés dans le cadre du partenariat ne faisait l’objet d’aucun suivi.

Les ECO

LES NOUVELLES MESURES FISCALES SE PRÉCISENT

Des zones d’ombre subsistaient concernant l’application du nouveau régime particulier de la marge introduit dans la loi de Finances 2017. La DGI vient d’apporter les clarifications nécessaires.

La loi de Finances 2017 a marqué un tournant dans le traitement fiscal des prestations des agences de voyages. Un nouveau régime particulier de la marge a finalement été installé. Les voyagistes seront désormais taxés sur la marge et non sur le chiffre d’affaires. La nouvelle mesure, faut-il le rappeler, s’applique à l’ensemble des agences réalisant des opérations d’achat et de vente de services de voyage utilisés au Maroc à l’exception des prestations rémunérées par une commission qui, elles, continuent d’être taxées selon les conditions de droit commun.

La publication des nouvelles dispositions dans le Bulletin officiel n’était pas suffisante pour clarifier certaines zones d’ombres, en lien avec le mode d’application du nouveau régime. Suite à une requête de l’Ordre professionnel des comptables agréés, la Direction générale des impôts vient d’apporter les précisions nécessaires à travers la Direction de la législation, des études et de la coopération internationale. D’abord en matière de TVA, les opérateurs s’interrogent: à partir de quel moment le régime de la marge peut-il être appliqué, notamment quand il s’agit d’une opération d’achat et de revente d’un service de voyage (un séjour dans un hôtel par exemple, sachant que le séjour est la seule prestation vendue et que la facture délivrée au client fait apparaître le montant global de la prestation)? La réponse de l’administration fiscale est on ne peut plus claire: le régime de la marge s’applique au moment où l’agence de voyage procède à l’achat et à la revente d’une prestation et qu’en contrepartie, celle-ci n’est pas rémunérée par une commission.

En cas de réception d’avances non facturées, la DGI souligne que celles-ci ne constituent pas le fait générateur de la TVA dans le cadre du nouveau régime. Dans ce cas précis, le fait générateur est constitué par l’encaissement total des sommes perçues par l’agence de voyage au titre d’une opération.

Le seuil décisif de 500.000 DH

En matière d’IS, les voyagistes ont soulevé la question du montant de chiffre d’affaires à comptabiliser pour les opérations soumises à la TVA sur la marge (s’agit-il du montant global facturé ou du montant de la marge HT?). Réponse du fisc: le chiffre d’affaires à prendre en considération pour la détermination du résultat fiscal ou de la cotisation minimale, pour les opérations soumises à la TVA, selon le régime spécifique de la marge, est le montant global facturé, dans la mesure où l’agence de voyage ne facture pas de TVA à ses clients dans ce cas précisément.

Interpellée sur le cas des petits fabricants et prestataires de services nouvellement identifiés, la DGI rappelle qu’ils restent hors champ d’application pour la première année d’existence. Lorsque le chiffre d’affaires taxable réalisé et comptabilisé au Compte de produits et charges (CPC) de l’année N-1 est supérieur à 500.000 DH, la personne concernée devient passible de la TVA, à partir du 1er janvier de l’année N (Idem pour les années suivantes). Le chiffre d’affaires à prendre en considération est celui facturé et comptabilisé au niveau du CPC. Maintenant, pour les entreprises existantes au 12 juin 2017 (date de publication de la loi de Finances en cours d’exécution), la DGI affirme que celles-ci ne peuvent remettre en cause leur assujettissement que lorsqu’elles réalisent un chiffre d’affaires inférieur à 500.000 DH pour les trois dernières années (2015, 2016, 2017). Par ailleurs, les nouvelles dispositions étant applicables à compter du 1er août 2018, les professionnels s’interrogent sur le régime valable pour les agences créées entre le 12 juin et le 31 décembre 2017.

La DGI fait ici la distinction entre deux types de cas. D’une part, les petites unités de fabrication et de prestation de services situées hors champ d’application de la TVA pour la période entre le 12 juin et le 31 décembre. Pour les autres entreprises nouvellement créées -autres que celles précitées- elles demeurent soumises à la TVA dès leur création, abstraction faite du chiffre d’affaires réalisé au cours de cette période.Enfin, l’on s’interroge sur le cas des restaurants, cafés, snacks, loueurs de voitures et transporteurs touristiques: peuvent-ils être classés comme petits prestataires? L’administration fiscale insiste à ce titre sur le fait que l’élément déterminant pour la qualification du petit prestataire reste le seuil du chiffre d’affaires taxable réalisé de 500.000 DH. Toutefois, indique la DGI, si le chiffre d’affaires taxable déclaré pendant trois exercices consécutifs n’atteint pas ce montant, les personnes concernées seront hors champ d’application de la TVA.

PAS DE PAIEMENT RÉTROACTIF DES DROITS DE DOUANE SUR LES PRODUITS EN PROVENANCE DU SAHARA

Les entreprises important des produits du Sahara ne doivent pas s’acquitter des droits de douane sur les expéditions destinées au territoire européen, réalisées avant le 22 décembre 2016. La date coïncide avec la publication de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Cette instance judiciaire européenne avait dicté que les accords d’association entre le Maroc et l’UE ne sont pas applicables au Sahara.

La commission européenne vient d’exclure toute réclamation de taxes douanières à effet rétroactif. C’est la réponse donnée par le commissaire européen aux affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, à une question formulée par l’europarlementaire du groupe de la Gauche unifiée, Paloma Lopez.

La députée communautaire avait interpellé l’instance européenne sur les mesures prises par celle-ci afin de récupérer les droits de douane relatifs aux expéditions en provenance du Sahara. Selon la position de la CE, les droits de douane aux importateurs ayant introduit des marchandises en provenance du Sahara, avant la publication de l’arrêt, ne sont pas justifiés.

Challenge

Francfort : Elalamy invite 320 VIP de l’industrie automobile mondiale

Le Salon automobile de Francfort ouvre ses portes du 14 au 24 septembre et depuis hier aux professionnels et à la presse. Un événement qui est considéré comme le salon de référence le plus important du monde entier pour la mobilité, le transport et la logistique. A la tête d’une délégation de haut niveau, Moulay Hafid Elalamy a poursuivi sa quête d’investisseurs potentiels pour booster encore la capacité de production nationale de véhicules. Le ministre de l’Industrie, de l’Investissement, du Commerce et de l’Économie numérique et InvestMorocco, ont convié  hier mardi 12 septembre à une soirée Networking, dans le cadre de ce grand rendez-vous de Francfort, le gotha de l’automobile mondial.

Bon démarrage pour l’indien Cipla au Maroc

Pour son premier exercice plein, Cipla Maroc le nouveau-né de l’industrie pharmaceutique marocaine s’en sort plutôt bien. En effet, le premier laboratoire marocain affilié à un industriel indien a dégagé son premier bénéfice au titre de l’exercice fiscal 2016/2017 (clos le 31 mars). Une performance certes encore limitée (à un peu moins qu’un million de DH), mais cela relève de l’exploit sachant que la maison-mère basée à Mumbai n’a lancé la construction de son usine marocaine qu’en fin 2015, et que les coûts de démarrage d’une telle unité ayant nécessité un investissement de près de 150 millions de DH ne sont pas négligeables.

Avec la finalisation en cours des tests de fabrication des MDI (aérosols et inhalers) liés aux infections respiratoires et aux troubles neurologiques, CIPLA Maroc devra enregistrer une montée en puissance dès l’année en cours avec un chiffre d’affaires anticipé à plus de 50 millions de DH. Elle aura surtout à son actif la réalisation d’une première pour l’industrie pharmaceutique marocaine qui ne produit pas encore ce genre de médicaments.

Rappelons que Cipla Maroc compte dans son tour de table deux minoritaires marocains (avec 20% du capital chacun) au côté de Cipla UK (filiale britannique du groupe éponyme) qui en contrôle 60%. Il s’agit de Cooper Pharma (un des majors du secteur au Maroc avec un chiffre d’affaires qui tutoie la barre de 1,5 milliard de DH) et de Pharmaceutical Institute (PHI), un laboratoire de taille moyenne qui opère sur le marché des médicaments sous licence notamment en partenariat avec le britannique GlaxoSmithKline (GSK). Quant au groupe Cipla, qui fait partie des 20 premiers génériqueurs au monde avec un chiffre d’affaires consolidé 2017 de plus de 2,2 milliards de dollars (plus de 20 milliards de DH), il consolide avec sa nouvelle filiale marocaine son dispositif industriel en Afrique qui est déjà très fortement déployé en Afrique du Sud et en Ouganda et dans une moindre mesure en Tanzanie, au Nigeria, au Kenya, ou encore en Algérie où il a lancé une joint-venture avec le groupe local Biopharm presque concomitamment à son implantation au Maroc avec une enveloppe d’investissement quasi-identique.

LA VIE ECO

ENTRÉE EN VIGUEUR IMMINENTE DE LA LA LOI 74-15 RELATIVE À LA RÉGION MINIÈRE DE TAFILALET ET DE FIGUIG

La loi 74-15 relative à la région minière de Tafilalet et de Figuig entre en vigueur le 19 septembre, soit une année après sa publication au Bulletin officiel.

«Cette région a toujours accueilli une activité minière artisanale. Cette activité est régie par le dahir du 1/12/1960. La loi 74-15 vise l’ouverture de la région aux investisseurs et la relance de l’activité minière, tout en sauvegardant les droits et les intérêts des artisans», commente une source au sein du ministère des énergies et des mines (MEM). «Actuellement, il est admis que l’exploitation minière artisanale ne peut plus se développer étant donné que les minéralisations deviennent de plus en plus profondes, nécessitant des moyens et des méthodes de mise en valeur avancés dépassant largement la capacité des artisans. De ce fait, et pour redynamiser l’activité minière dans cette région et l’aligner sur les autres régions du Royaume, la restructuration de l’activité s’impose et se voit déjà initiée par la loi 74-15 qui entre en vigueur ce mois de septembre», conclut-elle. Le plomb, le zinc et le sulfate de baryum (barytine) sont les principales mines exploitées dans cette région qui correspond aux provinces de Figuig, Errachidia, Tinghir, Midelt, Zagora et Boulemane.

CROISSANCE : LE MAROC EN SOUS-RÉGIME DEPUIS 2008

La croissance potentielle ressort autour de 3,3% en moyenne sur la décennie 1990 à 1999. La barre est ensuite montée de manière notable à plus de 4,5% sur les 7 années suivantes pour se dégrader par la suite.

Depuis quelques années, l’idée fait son chemin que la croissance économique du Maroc reste bien en dessous de son potentiel. Mais quel est au juste ce potentiel et de combien s’en écarte-t-on dans les faits ? L’exercice d’estimation de ces données n’a quasiment jamais été fait pour le Maroc si l’on excepte quelques rares tentatives datant d’avant la crise internationale de 2008. C’est dire l’intérêt du travail accompli par des cadres de Bank Al-Maghrib qui se sont employés à passer au crible croissance potentielle et réelle de l’économie nationale sur les 25 dernières années, dans une étude qui vient d’être publiée. Comment déjà définir de manière générale la croissance potentielle. Les auteurs de l’étude en rappellent la définition économique : il s’agit du niveau de croissance compatible avec une utilisation maximale des capacités de production de l’économie, sans pressions inflationnistes. En s’aidant de plusieurs méthodes, les auteurs chiffrent d’abord le niveau de croissance potentielle du Maroc qui, l’on s’en doute, varie dans le temps. Il en ressort que cette croissance potentielle ressort autour de 3,3% en moyenne sur la décennie 1990 à 1999. La barre est ensuite montée de manière notable à plus de 4,5% sur les 7 années suivantes pour se dégrader par la suite. Ainsi, à partir de 2008 l’économie marocaine ne pouvait croître dans le meilleur des cas que de près de 4% en moyenne. Avant de rapprocher ces données de la croissance réelle de l’économie il est intéressant de comprendre pourquoi la croissance potentielle du Maroc a chuté depuis 2008. Il faut évidemment y voir les retombées de la crise économique et financière profonde et prolongée au cours des dernières années, justifient les auteurs de l’étude. Plus précisément, la croissance potentielle du Maroc a fait les frais depuis 2008 de la baisse de la contribution du capital d’une part et du travail d’autre part. Pour le premier, la dégradation provient principalement de la forte baisse de l’effort d’investissement observée à partir de 2009. A ce titre, les experts de BAM précisent que même si le taux d’investissement au Maroc a été parmi les plus élevés au monde, il a connu une stagnation depuis 2009 avant de se replier à partir de 2014 à un niveau inférieur à celui des pays émergents. Pour sa part, la dégradation de la contribution du travail découle de la croissance moins soutenue de l’effectif des actifs occupés au Maroc à partir des années 2000. Ce constat explique également la baisse du taux d’activité qui est passé d’un niveau de 54,4% en 1999 à 47,4% en 2015.

LA RÉFORME DES CENTRES RÉGIONAUX D’INVESTISSEMENT RÉACTIVÉE

Le gouvernement a constitué une commission interministérielle présidée par le ministère de l’intérieur et constituée de départements ministériels concernés. Objectif : mener une refonte complète de l’action et de l’organisation des CRI. Le secteur privé ne cache pas son mécontentement face à l’action de ces structures depuis leur création.

Les Centres régionaux d’investissement compliquent l’acte d’investir ! Ce constat, pour le moins paradoxal, a été relevé par le Souverain dans le dernier discours du Trône, mettant un grand point d’interrogation sur toute la philosophie qui a présidé à la création de ces structures début 2002. A cette date, la lettre royale (9 janvier) instituant cette réforme mettait l’accent sur «les difficultés que rencontrent les promoteurs en raison des formalités nombreuses et complexes exigées pour la constitution de sociétés ou d’entreprises individuelles et l’aboutissement des procédures administratives nécessaires à l’acte d’investir». Quinze ans après, cette réforme qui se voulait «un modèle de réforme de l’administration» est loin d’être concluante ! Le discours du Trône du 30 Juillet faisait le constat selon lequel «les Centres régionaux d’investissement, si l’on en excepte un ou deux, constituent un problème et un frein au processus d’investissement : ils ne jouent pas leur rôle de mécanisme incitatif».

Pourquoi donc ces structures censées favoriser la création d’entreprises et faciliter l’acte d’investir en deviennent l’écueil ? Qu’est-ce qui fait qu’un centre régional est performant et qu’un autre l’est moins ? Et quels sont les recadrages qui s’imposent pour rectifier le tir ?

A la base, il faut rappeler que la réforme de 2002 voulait étendre et concrétiser, dans un domaine essentiel du développement économique et social qu’est l’investissement, la vision du rôle de l’autorité au service du citoyen, étant donné que le cadre régional peut être la dimension territoriale et administrative la plus opportune, compte tenu des moyens dont dispose actuellement l’administration territoriale. Pour ce faire, les 12 CRI aujourd’hui en activité, placés sous la responsabilité des walis des régions, ont deux fonctions essentielles : l’aide à la création d’entreprises et l’aide aux investisseurs, et donc sont composés de deux guichets. Le guichet d’aide à la création d’entreprises est l’interlocuteur unique de toutes les personnes qui veulent créer une entreprise, quelle qu’en soit la forme. Son personnel met à la disposition des demandeurs un formulaire unique dans lequel figurent tous les renseignements exigés par la législation ou la réglementation pour la création de l’entreprise. Ce personnel accomplit toutes les démarches nécessaires pour recueillir, auprès des administrations compétentes, les documents ou attestations exigés par la législation ou la réglementation, et qui sont nécessaires à la création d’une société. Dans un délai correct et réduit au maximum, il fournit au demandeur les pièces justificatives délivrées par les administrations établissant l’existence de l’entreprise.

La fonction du second guichet, celui d’aide aux investisseurs, est de procurer aux investisseurs toutes les informations utiles pour l’investissement régional, étudie toutes les demandes d’autorisations administratives et prépare tous les actes administratifs, nécessaires à la réalisation des projets d’investissement dont le montant est inférieur à 200 MDH. Ceci pour permettre au wali de la région de délivrer les autorisations ou de signer les actes administratifs afférents à ces investissements. Le CRI étudie aussi, pour les investissements dont le montant est égal ou supérieur à 200 MDH, les projets de contrats ou de conventions à conclure avec l’Etat, en vue de faire bénéficier l’investisseur d’avantages particuliers, et les transmet à l’autorité gouvernementale compétente pour approbation et signature par les parties contractantes. Bien entendu, tout cela n’a pas été laissé sans contours : des études doivent être menées régulièrement par les délégués régionaux des départements ministériels compétents qui rendent compte au wali de l’exercice de leurs compétences et leurs missions.

Actuellement, pour évaluer l’accomplissement de ces fonctions, les indicateurs n’existent pas pour la plupart des CRI. Certains (4 plus précisément) ont adopté des plans d’action qui arrêtent les objectifs à suivre à moyen terme. Toutefois, ces plans ne disposent pas d’indicateurs de performance et de budgets nécessaires à leur réalisation. Pour les autres CRI, des plans annuels ont été élaborés. Ces derniers sont calqués sur les stratégies sectorielles mises en place au niveau national. Ce qui n’aide pas à apprécier la véritable valeur ajoutée des centres, d’autant plus qu’au niveau de l’évolution des investissements ayant transité par les centres, une variabilité très importante d’année en année est constatée. Pas de tendance de fond, haussière, et soutenue dans la durée quant au nombre de projets autorisés et le montant des investissements.

Des carences sérieuses en matière de gouvernance au niveau régional

Quoi qu’il en soit, sur le terrain, la pléiade d’investisseurs sondés sont dans leur majorité insatisfaits. Ils rapportent que leurs demandes, allant des plus basiques (préparation d’actes administratifs, mise en contact…) jusqu’aux autorisations complexes, ne trouvent pas écho auprès de plusieurs CRI. Une source à la CGEM résume ce constat en déplorant un grand déficit en matière de gouvernance et une défaillance du processus de prise de décision. «Il n’y a personne pour prendre le risque, d’autant plus que les commissions qui statuent sont multi-départementales, elles se rejettent la responsabilité, arguant à chaque fois qu’elles ne sont pas habilitées à le faire», détaille-t-elle.

Le discours du Trône a vu juste quand il a repris une vérité générale et un mal éternel: «L’un des problèmes qui entravent aussi le progrès du pays est la faiblesse de l’Administration publique, en termes de gouvernance, d’efficience ou de qualité des prestations offertes aux citoyens». Voilà qui est dit ! «La pluralité des intervenants dans les commissions et le nombre de documents à produire ôtent au concept de guichet unique toute son efficacité et allonge indéfiniment les délais», témoigne un promoteur marocain de la région du Nord qui se rappelle sa mésaventure avec le CRI pour une autorisation obtenue au bout de… 3 ans! La source de la CGEM affirme que le bât blesse davantage quand il s’agit d’investisseurs étrangers qui, déçus par le retard et l’inefficacité des CRI, préfèrent rebrousser chemin, citant un grand groupe allemand qui préparait une joint-venture avec un opérateur local, sans suite ! Un autre entrepreneur rapporte qu’il a dû se déplacer à plusieurs reprises au CRI, à l’OMPIC, et à la Direction des impôts. «La représentation effective des administrations auprès des CRI est l’une des principales contraintes obligeant parfois les CRI ou les personnes qui comptent créer des entreprises à faire le tour auprès des différentes administrations concernées», expliquent des responsables de l’Administration. Il est à noter que peu de CRI disposent d’un guichet unique où sont représentées toutes les administrations concernées par la création d’entreprise (5 au maximum). La qualification des ressources humaines est également montrée du doigt par plusieurs investisseurs qui trouvent qu’elles se limitent à des missions basiques alors que la vocation du CRI implique qu’il soit outillé de compétences qui maîtrisent les forces et faiblesses de la région et qui peuvent améliorer l’attractivité et le marketing territorial. Aussi, plusieurs élus sont déconnectés de l’investissement dans leurs collectivités et n’en font pas une priorité. Les investisseurs relatent également que le guichet d’aide à la création d’entreprise manque souvent d’annexes au niveau provincial, préfectoral ou communal pour prendre en charge toutes les demandes, alors que le besoin existe. Les officiels expliquent cette carence par un déficit de moyens.

Une commission chargée du dossier de la gouvernance et de la réforme de l’Administration sera créée

Force est de constater que plusieurs carences rapportées par les investisseurs, quelques responsables de CRI, et les gestionnaires de la chose locale ont été déjà relevées par la Cour des comptes dans deux rapports datant de 2009, puis 2011. Pas de vision stratégique, manque de cohérence entre les plans sectoriels et ceux des CRI, manque de moyens logistiques et humains, absence d’échanges en temps réel entre les CRI et les administrations, pas de prérogatives juridiques pour plaider la mobilisation et la prise en compte des besoins en foncier pour le développement futur de l’activité économique… La liste est longue ! Néanmoins, même avec cela, les officiels rétorquent que «les CRI ont pu mettre en place des dispositifs sérieux et ambitieux en faveur des investisseurs en vue d’aider à la facilitation des démarches administratives et le renforcement de l’investissement», ajoutant qu’une partie de l’effort est visible dans le nombre de création d’entreprises, «en hausse d’année en année pratiquement dans tous les guichets». Quoi qu’il en soit, il est clair que des actions urgentes de recadrage de la réforme s’imposent ! Chose faite: au lendemain du discours et face à la fermeté des messages relayés, l’Exécutif n’a pas mis beaucoup de temps pour réagir. Selon des sources au ministère de l’industrie et du commerce, un chantier de réforme globale pour une modernisation complète des CRI vient d’être lancé. Le gouvernement a constitué une commission interministérielle en charge de ce chantier, présidée par le ministère de l’intérieur et constituée des départements ministériels concernés. Aussi, une grande mesure qui porte sur l’administration, qui semble se trouver au centre de l’échec de cette réforme des CRI, a été décrétée. Il s’agit en effet de la création d’une commission chargée du dossier de la gouvernance et de la réforme de l’Administration qui sera composée de plusieurs ministères et présidée par le ministère délégué auprès du chef du gouvernement chargé de la fonction publique et de la modernisation de l’Administration. Enfin, le chef du gouvernement a appelé à l’accélération de l’élaboration des mesures de simplification des procédures administratives et leur annonce dans les plus brefs délais. Reste qu’en dehors de toute réforme des institutions, c’est d’abord l’humain qui doit faire sa mue! «Pour mettre fin aux dysfonctionnements de ces centres, il appartient au gouverneur et au caïd, au directeur et au fonctionnaire, ainsi qu’au responsable communal, d’adopter les méthodes actives de travail et les objectifs ambitieux des cadres du secteur privé pour aboutir à des résultats concrets», résume le Souverain sans ambages.