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CE QUE SERA LA NOUVELLE MONDIALISATION

L’orgueil des hommes se heurtera toujours à la complexité de la nature qui dépasse et déjoue celle des œuvres humaines. J’espère que les apprentis sorciers, comme certains idéologues de l’«intelligence» artificielle, y trouveront matière à réflexion.
Plus un phénomène est complexe, plus il est difficile de dater l’apparition des «cygnes noirs» même identifiés. C’est la vraie difficulté, à la limite insurmontable.

Culture et bureaucratie

Les Etats, dont la responsabilité première est de protéger leurs ressortissants, doivent donc entretenir des capacités d’action face aux catastrophes prévisibles mais non datables. Or, les choix publics dépendent au moins autant de la culture des sociétés vis-à-vis du risque que de la qualité de leurs bureaucraties et de celles de leurs dirigeants. De ce point de vue, la comparaison entre l’Allemagne et la France au cours des premières semaines de l’actuelle pandémie est à l’avantage de la première, alors que les deux pays dépensent en gros les mêmes montants pour leurs systèmes de santé. L’impréparation américaine est particulièrement troublante. En Asie, la situation est différente en raison de la fréquence des épidémies.

Quand on parle de choix publics en ces matières, il faut en principe distinguer entre la prévention et la réaction puis l’adaptation, tant au niveau national qu’international. En réalité, prévention et réaction ou adaptation sont liées, car moins on s’est préparé à une catastrophe ex-ante, plus la réaction et l’adaptation sont coûteuses ex-post. Trop souvent engluées dans l’immédiat, les sociétés tendent à refuser le coût public de la prévention. Ceci est vrai dans tous les domaines. Face à la vitesse de cette pandémie, les dirigeants ont d’abord fait le choix, avec les moyens du bord, de sauver le maximum des patients les plus sévèrement atteints par le coronavirus, en s’interdisant même de soulever la question des conséquences économiques et sociales des mesures prises à cet effet. On ne peut pas les en blâmer.

Mais passé le temps de la sidération — elle-même la conséquence de l’impréparation —  on est bien obligé, partout dans le monde, de raisonner de manière plus large. Impossible par exemple d’ignorer les ravages qu’une baisse aussi brutale de l’activité économique mondiale, ou encore le confinement de centaines de millions de pauvres sur les cinq continents, commencent à provoquer. Les famines et la recrudescence d’autres maladies menacent. Il est à craindre qu’in fine le nombre des victimes indirectes de la pandémie soient supérieur à celui des décès directement dus au coronavirus.

Symbole méconnu de la mondialisation, les câbles sous-marins transportent 95% des communications, leur longueur totale est bien au-delà du million de km (N1)

Le socioéconomique se ré-impose

Le débat sur le déconfinement dépasse de beaucoup celui qui se joue entre les experts médicaux, lesquels forment une tribu parmi d’autres. Entrer dans une phase du déconfinement, c’est aborder la question des choix publics avec des arbitrages incluant des intérêts précédemment mis entre parenthèses.

Qu’on le veuille ou non, les gouvernements sont condamnés au calcul économique et social.

Depuis un an, on voit l’Allemagne se résigner à commencer à envisager que la relation transatlantique puisse avoir structurellement changé de nature. L’Alliance atlantique ne sera plus jamais ce qu’elle fut pendant la guerre froide. Dans le même temps, les Allemands comme les Français se sont mis à regarder la Chine différemment. Ils ressentent désormais la nécessité de s’en protéger. La France et l’Allemagne restent, comme elles l’ont toujours été, le pilier de la construction européenne.

L’enjeu géopolitique de notre temps est immense. Dans l’immédiat, il s’agit de prouver que «Bruxelles» peut surmonter les deux grands défis du moment: l’efficacité et la démocratie.

Par Thierry De MONTBRIAL

Source : https://www.leconomiste.com/article/1062204-ce-que-sera-la-nouvelle-mondialisation