PROXIMO REVUE DE PRESSE DU 12 Octobre 2020

Voiture autonome : Google fonce, les constructeurs lèvent le pied

Après s’être grisés d’annonces, les grands groupes automobiles sont revenus sur terre face à la multitude d’obstacles à surmonter pour se passer un jour complètement du conducteur. La crise sanitaire a hâté la réduction des budgets R&D sur ce sujet, tandis que Waymo, la branche de robotaxis de Google, accélère.

Waymo est-il en train de prendre un avantage décisif dans la course au véhicule autonome ? Alors que la jeune pousse de la galaxie Google passe un cap important en ouvrant progressivement au public le service de VTC sans chauffeur qu’elle teste dans certains quartiers de Phoenix, en Arizona, la majorité des constructeurs traditionnels semblent de leur côté avoir levé le pied.

Il y a deux ans, ils rivalisaient pourtant d’annonces sur le sujet, avec force détails sur les expérimentations en cours. Mais cet enthousiasme a peu à peu faibli, face au montant des investissements à réaliser et à la multitude d’obstacles techniques, réglementaires, ou encore juridiques à surmonter avant d’arriver à une voiture 100 % autonome

Payer des impôts sans le savoir

Un petit précis utile et fort bien fait sur les mille et une ficelles de l’administration pour augmenter les impôts sans que cela se voie.

Le sous-titre du petit livre de Frédéric Douet – « Techniques de plumaison des contribuables sans trop les faire crier » – est à lui seul prometteur. Et il ne s’agit pas d’une fausse promesse de la part de ce professeur de droit fiscal à l’université de Rouen-Normandie. Avec dextérité, il explore les mille et une manières dont l’Etat, même lorsqu’il affirme baisser les impôts, s’arrange pour maintenir la pression sur le contribuable sans que cela se voie trop. Le plus efficace est évidemment de complexifier à l’extrême le système, comme le démontre l’un de ses chapitres. Mais il existe bien d’autres ficelles, comme les faux avantages fiscaux ou la création d’un impôt sur l’impôt, autant d’astuces qui permettent à l’administration de faire rentrer des recettes sans en payer un prix politique trop élevé. Nullement poujadiste, ce petit ouvrage technique et très pédagogique est au contraire une clé de lecture précieuse pour comprendre ce qu’est l’impôt en France.

« Anti-Manuel de psychologie fiscale », par Frédéric Douet. Enrick Editions, 95 pages, 15,90 euros.

‘Funk Money’: The End of Empires, The Expansion of Tax Havens, and Decolonization as an Economic and Financial Event

This article explores the question of what happened to European assets in the process of decolonization. It argues that decolonization created a money panic of sorts that led white settlers, businessmen, and officials to seek to liquidate assets they owned and move funds out of the colonial world. Instead of being repatriated to metropolitan countries with high tax rates and exchange controls, money moved to tax havens. Decolonization thus provided an important share of early postwar tax haven business in a period when tax havens and offshore finance expanded during the 1950s and 1960s. In turn, the withdrawal of Euro-American investments from the decolonizing world set the stage for the politics of development and modernization in the coming decades. Ironically, the outflow of funds during decolonization and the subsequent return of some funds in restructured form as investments by multinational and other companies soon caused difficulties in newly independent developing countries. Companies soon found ways to rebook profits to have occurred in a tax haven rather than in the developing world, thus depriving low-income countries from tax revenue. The withdrawal of Euro-American investments from the colonial world during decolonization moreover had implications for the growth of portfolio investment, as funds removed from colonies were often invested through a tax haven onwards in US securities. All in all, decolonization was an economic and financial event that is only beginning to emerge in full detail.

La transformation du groupe OCP analysée dans un nouvel ouvrage académique

Le nouvel ouvrage académique collectif « Africa Positive Impact », qui vient de paraître à Paris, consacre tout un chapitre à la transformation du groupe OCP, sous la signature de Dr Mohamed Benabid, enseignant-chercheur.

Dans sa contribution intitulée « L’Afrique, laboratoire d’innovation frugale pour le monde: Le cas du groupe OCP », l’auteur interroge la portée de la dynamique de transformation de l’Office ainsi que son impact sur l’environnement interne et externe de l’organisation, sous un angle d’innovation frugale.

« Le cas OCP montre bien que de grands groupes peuvent déployer des solutions d’innovation frugale moyennant des réaménagements dans les process et structures existants. En à peine une douzaine d’années, l’entreprise a pris conscience de la nécessité d’éviter de concentrer les responsabilités créatives et repenser ses logiques de production et de gouvernance de manière à créer de la valeur à la fois pour le groupe et pour les communautés », écrit M. Benabid.

Pour lui, « l’innovation ne semble pas tellement se situer ici dans la technicité des plateformes déployées, mais plutôt dans la force des échanges, de l’expérience et des interactions. Elle ouvre dans la foulée des fenêtres de reconnaissance à la créativité ».

Dans cette configuration, l’utilisateur occupe une place centrale et il est dès lors permis d’affirmer que la seule ressource qui semble mobilisée en abondance est celle du capital humain, estime M. Benabid, qui fait observer que l’originalité de telles approches collaboratives est qu’elles confèrent aux entreprises qui les adoptent un avantage indiscutable face à la concurrence, en ce sens qu’elles sont difficilement copiables et s’enracinent dans l’ADN de l’organisation.

« Loin du solutionnisme managérial et organisationnel, l’innovation frugale en mode OCP s’appuie sur des recettes anciennes et nouvelles, sur les cadres bardés de diplômes du siège, les ingénieurs des sites de productions, tout comme sur les TAMCA où les ouvriers-employés des sites de Khouribga, Youssoufia ou Boucraa » souligne l’auteur, qui note que dans ses prolongements vers les communautés, cette innovation se destine à des milliers de personnes au Maroc ou en Afrique que l’OCP accompagne dans une quête d’amélioration du quotidien.

Publié aux éditions EMS (Editions Management & Société)(Collection Académie des Sciences du Management de Paris), et coordonnée par Pr. Soufyane Frimousse, l’ouvrage « Africa Positive Impact » souhaite comprendre comment l’Afrique s’est engagée par des voies novatrices qui lui sont propres dans un véritable processus de transformation. Une plateforme d’enseignants-chercheurs et d’experts en provenance d’une vingtaine de pays ont contribué à l’ouvrage.

Entreprises/Covid-19 : Remise des majorations de retard, astreintes et frais de recouvrement des créances de juin et antérieures

LES ENTREPRISES, IMPACTÉES PAR LA PANDÉMIE DU NOUVEAU CORONAVIRUS (COVID-19) ET REMPLISSANT LES CONDITIONS ÉNONCÉES DANS LE DÉCRET N°2.20.331, PEUVENT, DEPUIS LE 25 SEPTEMBRE DERNIER, BÉNÉFICIER, EN APPLICATION DE LA DÉCISION MINISTÉRIELLE CONJOINTE N°004/2020, D’UNE REMISE TOTALE DES MAJORATIONS DE RETARD, ASTREINTES ET FRAIS DE RECOUVREMENT RELATIFS AUX CRÉANCES CONCERNANT LA PÉRIODE JUIN 2020 ET ANTÉRIEURES, INDIQUE LA CAISSE NATIONALE DE SÉCURITÉ SOCIALE (CNSS). 

Pour bénéficier de cette mesure, lesdites entreprises doivent payer le montant en principal de la créance, soit en s’acquittant de façon intégrale, soit en optant pour un règlement échelonné dans le cadre d’un arrangement de facilité de paiement pouvant s’étendre sur une période de 60 mois selon des critères bien précis, à condition que les cotisations en cours soient payées pendant la période de l’échéancier, fait savoir la CNSS dans un communiqué.

Par ailleurs, la Caisse rappelle à l’ensemble de ses affiliés débiteurs et non concernés par la décision précitée, qu’ils peuvent, en application de la décision ministérielle conjointe n° 002/2020 du 01/07/2020, bénéficier d’une remise partielle des majorations de retard, astreintes et frais de recouvrement relatifs aux créances de l’exercice 2016 et antérieurs. Le taux de cette remise varie, en fonction de la durée de paiement choisie, entre 30% et 90%.

Aussi, pour simplifier les démarches aux entreprises affiliées, désirant bénéficier des dispositions prévues par l’une des deux décisions ministérielles, la CNSS a mis en place un portail électronique dédié.

Ainsi, pour souscrire à l’une des deux mesures, l’employeur affilié devra se connecter via le portail Damancom ou à travers le lien « damancom.ma/recouvrement ».

Pour plus d’informations sur l’utilisation du portail, une vidéo tutoriel et un guide expliquant de manière simple les démarches à entreprendre pour une utilisation optimale du site ont été mis à la disposition des entreprises sur le site officiel de la CNSS ainsi que sur ses pages officielles sur les réseaux sociaux.

155 MILLIARDS DE DIRHAMS ENVOLÉS EN DEUX ANS

LE PHÉNOMÈNE DE LA FUITE DES CAPITAUX A LA PEAU DURE AU MAROC

L’hémorragie de la fuite des capitaux se poursuit. Le phénomène, qui prend de l’ampleur d’année en année, touche le continent africain et particulièrement le Maroc. Un rapport de la Conférence des Nations-Unis sur le commerce et le développement (CNUCED), publié lundi 5 octobre 2020, a révélé que le continent africain perd environ 88,6 milliards de dollars par an à cause de la contrebande illégale de fonds et d’actifs, soit 3,7% de son produit intérieur brut. Entre 2000 et 2015, le total des flux financiers illicites perdus par l’Afrique avait augmenté et atteint 836 milliards de dollars. Un chiffre énorme qui dépasse la dette extérieure du continent, qui s’élevait à 770 milliards de dollars en 2018.

Le cas du Maroc est édifiant. Les flux financiers illicites sortant du pays ont atteint près de 16,6 milliards de dollars, soit 155 milliards de dirhams marocains entre 2013-2014, selon le même rapport. Une autre donnée renseigne sur un aspect masqué du phénomène au Maroc ou plutôt sur une fuite des capitaux qui ne dit pas son nom: les investissements des Marocains à l’étranger ont augmenté de 48% entre 2016 et 2019. Au titre des neuf premiers mois de l’année 2019, le flux net des Investissements directs marocains à l’étranger (IDME) a plus que doublé, passant de 2,96 MMDH à fin septembre 2018 à 6,57 MMDH à fin septembre 2019.

Le flop des amnisties

Le troisième aspect est relatif à la falsification des factures de produits importés et exportés, tant au niveau de la quantité que de la valeur, qui demeure le moyen le plus utilisé pour la fuite des devises. Un trafic qui cache les volumes réels des opérations commerciales légales.

Le gouvernement Benkirane avait lancé, fin 2013, une campagne pour convaincre les Marocains qui possèdent des biens à l’étranger (argent et actifs) de les rapatrier au Maroc, en les exonérant des pénalités, sanctions, amendes ou taxes. Cette opération n’a pas rapporté grandchose. Une deuxième opération du genre a été rééditée fin 2019 par le gouvernement El Othmani. Comme son aînée, elle n’a pas atteint les objectifs escomptés, à savoir le rapatriement des fonds déposés à l’étranger par des méthodes illicites.

L’amnistie offerte dans le cadre du PLF 2020 par le gouvernement El Othmani aux personnes ayant acquis des biens à l’étranger en contrevenant aux règles des changes en vigueur au Maroc sera, en tout cas, fort probablement, la dernière opération du genre.

Car quoi que l’on pense que ce phénomène a la peau dure, le Maroc aura accès dès 2021 à la liste de toutes les propriétés illégalement acquises à l’étranger par les Marocains ayant une résidence fiscale au royaume. L’entrée en vigueur d’un accord signé entre le Maroc et l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) portant sur l’échange automatique des données fiscales devrait faciliter cette procédure.

Crédit Agricole du Maroc : Un Produit net bancaire de 2,1 MMDH à fin juin

Des résultats semestriels probants pour le Crédit Agricole du Maroc. Le Groupe a affiché au titre des six premiers mois une performance financière avérée. En dépit de l’impact économique et social de la crise sanitaire, Crédit Agricole du Maroc a réussi à maintenir son produit net bancaire en progression. Il s’est établi à 2,1 milliards de dirhams à fin juin, en hausse de 9% comparé à la même période de l’année précédente. Une amélioration qui selon Crédit Agricole du Maroc est soutenue par la progression de la marge d’intérêt et du résultat sur opération du marché.
Atteignant les 418 millions de dirhams, le résultat net consolidé du Groupe s’est inscrit en hausse de 3%. Le résultat net part du groupe a affiché pour sa part une croissance à deux chiffres et ce, hors impact de sa contribution de 200 millions de dirhams au Fonds de soutien Covid-19 pour la gestion de la pandémie et du provisionnement supplémentaire au titre du «Forward Looking» en anticipation des risques futurs liés à l’impact de la crise. Il s’est chiffré à 449 millions de dirhams marquant ainsi une appréciation de l’ordre de 10%.

Les comptes sociaux ont affiché pour leur part la même tendance haussière. «Au niveau des comptes sociaux, le Produit net bancaire de la banque (2 milliards de dirhams) et son résultat net (250 millions de dirhams, hors impact du don au fonds Covid-19) marquent des progressions respectives de 12% et 4%», explique le Groupe qui attribue cette évolution à la maîtrise du coût des ressources et à la progression de l’encours des crédits à l’économie ayant permis d’enregistrer une croissance de la marge d’intérêt, et d’autre part, à la progression du résultat sur opérations de marché. Le Groupe Crédit Agricole du Maroc indique également que les ventilations positives de l’encours d’épargne et de l’encours de financement de l’économie découlent de la stratégie commerciale adaptative déployé par le groupe ainsi que de la dynamique engagée aussi bien pour la clientèle rurale qu’urbaine.

A cet effet, Crédit Agricole du Maroc a mobilisé 87 milliards de dirhams d’épargne, soit un encours de 3% comparé au même semestre de l’année passée. L’encours du financement de l’économie se situe pour sa part autour de 89 milliards de dirhams, en consolidation de 6,4%.

La Banque déclare par ailleurs avoir renforcé ses provisions pour risques généraux les portant à 1,3 milliard de dirhams, soit 1,5% de l’encours sain des crédits à la clientèle. Il est à rappeler que le Groupe Crédit Agricole est fortement engagé pour la relance économique et la lutte contre les effets de la Covid-19. Outre sa participation à l’Opération «Tadamoun» pour la distribution des indemnités CNSS et des aides financières servies par le fonds spécial dédié à la gestion de la pandémie, le Groupe a engagé plusieurs actions durant ce semestre.

Citons en premier la poursuite des offres «Intelaka» relatives au programme national «Al Moustatmir Al Qaraoui» pour l’accompagnement et le financement des petites entreprises et porteurs de projets éligibles dans le monde rural.

Le Groupe a, par ailleurs, mobilisé une enveloppe supplémentaire de crédits de 1,5 milliard de dirhams pour pallier les effets de la baisse de la pluviométrie sur les exploitants. Il a également signé une ligne de crédit de 560 millions de dirhams avec l’Agence française de développement pour le financement des projets énergétiques des exploitations agricoles et des unités agro-industrielles privées en zone rurale.

Crédit Agricole du Maroc a par ailleurs mis en place des produits dédiés pour la préservation du tissu économique soutenant ainsi les entreprises en difficultés et leur permettant de faire face aux versements des salaires et paiement des fournisseurs. Et pour accompagner ses clients vulnérables impactés par la crise sanitaire, le Groupe a procédé au report des échéances de leur crédit.

Quels sont les secteurs qui recrutent en pleine crise du Covid-19 ?

FOCUS DATA. Alors que l’économie redoute un second choc avec la nouvelle vague du coronavirus, certains secteurs en France font malgré tout preuve de résistance sur le front de l’emploi. D’autres profitent des opportunités liées notamment aux nouvelles habitudes de consommation. Ainsi, la montée en puissance de la mobilité électrique va créer 4.000 d’emplois dans l’industrie d’ici 2023. Les startups du digital quant à elles, portées par les échanges numériques tous azimuts, continuent leur percée, révèle le baromètre Trendeo. La Tribune fait le tour des secteurs qui recrutent malgré la crise.

La violence de la décrue pour les actifs français fût à la hauteur de la crise du coronavirus. Sur le seul emploi salarié, la destruction nette d’emplois s’est chiffrée à 715.000 postes entre fin décembre 2019 et fin juin 2020, selon une note de l’Insee de septembre. Malgré ce marasme, quels sont les secteurs qui résistent et ceux qui profitent du contexte pour doper leur activité et recruter? Parmi eux, la logistique, l’administration publique, la restauration rapide ou encore certaines activités de l’industrie manufacturière apparaissent comme des employeurs potentiels en pleine crise. De même, l’essor des activités en ligne, de la mobilité électrique et l’installation de « giga » projets portés par des grands groupes viennent apporter un peu de répit à l’heure des plans sociaux provoqués par la pandémie, comme le montrent les données de l’observatoire Trendeo (*).

Inscrire les énergies renouvelables dans une stratégie de flexibilité en fera le moteur économique du Maroc et du continent

L’Afrique a le potentiel de devenir un des prochains gagnants de l’économie mondiale, avec plusieurs pays africains enregistrant une forte croissance économique durant ces dernières années. Cependant, pour qu’un avenir meilleur puisse s’écrire, la modernisation du système d’approvisionnement et de distribution de l’énergie sur le continent reste une question clé. Pour le Maroc, la transformation engagée de son système électrique doit s’inscrire dans une logique de flexibilité visant à s’adapter aux contraintes d’intermittence et de saisonnalité du vent et du soleil. 

En 2017, la NASA a publié une série d’images satellites nocturnes de la Terre. Les images illustrent l’énorme disparité intercontinentale en matière d’éclairage. Dans le cas de l’Afrique, le manque de lumière reflète une réalité qui donne à réfléchir : plus de 600 millions d’Africains n’ont pas accès à l’électricité, et encore plus n’ont accès qu’à une électricité chère et intermittente. En Afrique du Sud, les blackouts (pannes de courant massives) et les blackouts (chutes de tension du système électrique) ne sont pas inhabituelles. Au Zimbabwe, les habitants ne peuvent compter que sur 8 heures d’électricité par jour depuis mars 2019 ! Bien qu’il existe des différences majeures entre les pays, le continent dans son ensemble a un énorme besoin d’électrification.

Un problème complexe

Les défis de l’Afrique en matière d’électricité sont d’autant plus marquants si l’on considère le fait que l’économie africaine est en croissance constante. Les données de la Banque africaine de développement montrent que le PIB du continent a atteint 3,5% en 2018 et devrait atteindre 4,1% en 2020, un chiffre qui pourrait être revu à la baisse en raison de la crise sanitaire. Alors pourquoi, malgré cela, de grandes parties de l’Afrique sont-elles encore privées d’un accès basique à l’énergie ? Tout simplement parce que l’offre n’a pas suivi le rythme de la demande. Cela est dû à un certain nombre de facteurs, comme la croissance démographique et l’urbanisation rapide, les coûts élevés de la production électrique existante et l’incapacité à réaliser les investissements nécessaires.

En effet, le continent africain a le taux d’urbanisation le plus rapide au monde. On prévoit que d’ici 2040, plus de la moitié de la population africaine vivra dans les zones urbaines. Cependant, les infrastructures de soutien – y compris les réseaux électriques – n’ont pas suivi le rythme, que ce soit au niveau des capacités de production mais aussi du réseau de distribution. De ce fait on observe de nombreuses perturbations du réseau électrique.

Les coûts d’exploitation des services publics nationaux constituent également un défi, car bien souvent, les coûts de production sont plus élevés que ce qui peut être facturé légalement aux consommateurs. En conséquence, ils doivent être continuellement subventionnés, ce qui va à l’encontre d’une logique de créer un marché de l’électricité pérenne. De plus, l’augmentation des prix n’est pas une solution viable, car cela pourrait miner la profitabilité des industries, le budget des ménages et ne permettrait pas une croissance économique saine. D’autant que le prix approximatif de l’énergie est déjà deux à trois fois plus élevé en Afrique qu’en Europe, alors que dans le même temps, le pouvoir d’achat de la population est nettement inférieur. Ce phénomène conduit naturellement à une situation de blocage.

L’option des énergies renouvelables 

Grâce à leurs ressources naturelles et aux nouvelles technologies, en particulier les énergies renouvelables, de nombreux pays africains ont toutefois une nouvelle opportunité pour poursuivre un développement durable. En effet le continent dispose d’un gigantesque potentiel de ressources solaires, éoliennes, ou hydrauliques. A titre d’exemple, le bassin du Congo dispose à lui seul d’un potentiel hydroélectrique suffisant pour alimenter l’ensemble du continent africain. 

De manière générale, l’optimisme quant à l’avenir du secteur énergétique africain est justifié. Comme pour le secteur de la téléphonie, le continent pourrait effectuer un bond en avant, en mettant directement en place les nouvelles technologies disponibles sur le marché. De la  même manière que pour le secteur des télécoms, où les téléphones portables se sont directement imposés sans passer par les lignes fixes, l’Afrique pourra se tourner vers les renouvelables sans avoir eu à se doter d’abord d’une grande capacité fossile ou de lourdes infrastructures de transport.  

Des solutions d’énergies renouvelables décentralisées peuvent rapidement être mises en place, accompagnées de capacités de stockage limitant les coûts d’infrastructure de transport et de solutions thermiques flexibles pour gérer l’intermittence et soutenir la stabilité des réseaux. Le gaz naturel, présent dans de nombreux pays, va jouer un rôle prépondérant dans ce développement. 

Le leadership régional du Maroc 

Le Maroc est engagé dans une transition majeure vers les énergies propres, avec pour objectif d’intégrer 52 % d’énergies renouvelables dans le mix des capacités de production installées d’ici 2030. Depuis 2009, le Maroc a fait d’importants progrès dans le développement d’un marché de l’énergie moderne, en ouvrant et en réformant davantage le secteur de l’électricité, en fixant des objectifs clairs en matière d’énergies renouvelables, en créant des entités spécialisées pour mettre en œuvre les programmes nationaux et en facilitant l’obtention des moyens réglementaires et financiers nécessaires.

De l’annonce d’un objectif de 52 % d’énergies renouvelables en 2030 lors de la COP 21 à la réalisation de ce qui était à l’époque la plus grande centrale solaire CSP du monde (580 MW) dans le cadre du projet Noor Ouarzazate, le Maroc s’est positionné à l’avant-garde du monde des énergies renouvelables en mettant en action une stratégie énergétique précise et engagée, avec les énergies propres au cœur de celle-ci. 

Au-delà des enjeux nationaux, le pays est moteur dans la promotion de l’intégration des marchés énergétiques régionaux avec l’Europe et l’Afrique. En tant que leader Africain dans le domaine, le Maroc s’appuie sur sa propre expérience en matière de transition énergétique afin de soutenir les transitions vers les énergies propres dans les pays d’Afrique subsaharienne, en soutenant leur développement durable, l’accès à l’énergie et le développement des ressources. De même, le Maroc cherche à faciliter le commerce de l’électricité renouvelable (et de l’hydrogène) avec l’Europe et ses voisins régionaux en Afrique en se positionnant en tant que hub énergétique pour les coopérations Sud-Sud et Nord-Sud.

La flexibilité au cœur de la transition énergétique au Maroc

Un réseau électrique avec une part élevée d’énergies renouvelables génère de l’instabilité du fait de leur nature intermittente. Il nécessite donc de multiples formes de flexibilité, c’est-à-dire des capacités de production et des moyens contractuels permettant de réagir en temps utile aux variations de l’offre et de la demande d’électricité. Le réseau électrique marocain dispose aujourd’hui de plusieurs moyens de flexibilité, grâce à l’hydroélectricité par pompage, aux centrales CSP avec stockage intégré et aux importations d’électricité (qui ont doublé au cours des dix dernières années). Le Maroc prévoit également une troisième interconnexion avec l’Espagne et une nouvelle avec le Portugal d’ici à 2027, renforçant ainsi les ingrédients nécessaires pour la mise en place d’un marché électrique régional. 

Toutefois, les besoins d’équilibrage du système électrique vont augmenter, la part des énergies renouvelables intermittentes dans la production d’électricité devant dépasser 20 % d’ici 2030 grâce aux ambitieux programmes éoliens et solaires du pays. Dans ce contexte, il devient primordial de penser le système électrique national futur dès aujourd’hui de façon à intégrer davantage de flexibilité, permettant ainsi d’assurer la sécurité énergétique nationale et d’optimiser les coûts d’exploitation du réseau. Un mix de solution de stockage d’énergie et de technologies à base de moteurs, qui sont celles qui assurent les meilleurs temps de réponse, permettrait au système électrique de s’adapter efficacement aux excès ou déficits soudain de production renouvelable.

Le COVID-19, une simulation en temps réel d’une forte pénétration d’énergies renouvelables dans le mix énergétique  

De manière intéressante, la crise du COVID-19 nous donne un avant-goût de ce qui nous attend en 2030 au Maroc. Nous avons créé au sein de Wärtsilä le Energy Transition Lab pour aider notre industrie, les décideurs politiques et le public à comprendre l’impact du COVID-19 sur les marchés européens de l’électricité et à analyser ce que cela signifie pour la conception et l’exploitation futures des systèmes énergétiques. Grace à cet outil, nous avons pu observer en temps réel une simulation grandeur nature des effets d’une forte pénétration de renouvelables dans le mix de production énergétique. En effet, en avril, la demande d’électricité a été particulièrement faible du fait des mesures de confinement et nous avons connu des journées très ensoleillées avec beaucoup de vent en Europe centrale et du Nord – c’est-à-dire des conditions parfaites pour produire de l’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables. 

Bien que ce scénario puisse sembler idéal, il a constitué en réalité un signal d’alarme pour l’industrie énergétique de plusieurs pays européens : même si les demandes en électricité auraient pu être satisfaites par des énergies renouvelables, les centrales au charbon et nucléaires ont continué à produire de l’électricité supplémentaire. En raison de leurs technologies inadéquates, elles ne pouvaient pas être mises en marche ou arrêtées de manière flexible. De plus, elles étaient nécessaires en tant que variables d’ajustement afin de prévenir rapidement toute éventuelle pénurie d’électricité et pour garantir la stabilité du réseau – ce que les énergies renouvelables ne sont pas en mesure de garantir du fait de leur intermittence. Tout cela a conduit à une quantité excessive d’électricité renouvelable sur les réseaux qui aurait pu avoir de lourdes conséquences (des balckouts, de fortes instabilités sur les réseaux, des conséquences financières…).

A titre d’exemple, l’Allemagne a battu ses records de production d’énergie verte en avril, les énergies renouvelables atteignant une part moyenne de 58 % de la production, soit une hausse de 11,4 % par rapport à l’année précédente. Si l’Allemagne avait pu arrêter ses centrales nucléaires et à charbon, elles auraient pu être remplacées par les énergies renouvelables disponibles pour couvrir 100 % des besoins énergétiques du pays. Au lieu de cela, l’Allemagne a dû payer d’autres pays (Norvège, Autriche…) pour exporter massivement son excès d’électricité (12GW) n’ayant pu ajuster ses outils de production « inflexibles ».  Ces pays produisaient eux-mêmes suffisamment d’énergie pour répondre à la demande locale, mais leurs réseaux disposaient également d’une certaine flexibilité et pouvaient donc contrôler leur production d’électricité, faisant ainsi place à l’énergie allemande. Le même phénomène s’est également produit à plusieurs reprises au Royaume uni ou le prix de l’électricité sur le marché est devenu négatif pendant des journées particulièrement venteuses, le parc éolien fournissant jusqu’à 55% de l’électricité du pays. Le régulateur britannique n’a eu d’autre choix que d’arrêter toutes les centrales à charbon et de payer l’opérateur EDF pour qu’il réduise la production de la centrale nucléaire de Sizewell B.

Vers un continent Africain avec 100% d’énergie renouvelable ?

Tout cela soulève de sérieuses questions pour l’avenir. La rapidité de la transition énergétique impose des critères supplémentaires dans les choix d’investissement pour assurer la pérennité et la meilleure rentabilité économique du réseau énergétique. Avec l’augmentation des énergies renouvelables intermittentes sur le réseau marocain, la flexibilité du système et l’adéquation entre les types de technologies dans le mix énergétique seront essentielles pour maintenir la stabilité du marché de l’électricité et du système électrique. A cet effet, le Maroc prévoit d’accroître la part du gaz naturel à plus long terme. Plusieurs nouvelles voies d’approvisionnement en gaz sont en cours de discussion, notamment l’importation de gaz naturel provenant d’un gazoduc avec le Nigeria, et la construction de terminaux GNL, qui peut donner accès à la flexibilité des contrats et des sources de production d’électricité.

Le Maroc pourrait-il fonctionner en construisant uniquement de l’énergie solaire, éolienne et des batteries? Oui, mais cela nécessiterait plus de capacité que le système flexible, ce qui entraînerait des coûts système de 12% plus élevés. Le système fonctionnant uniquement à l’énergie solaire, éolienne et sur batteries doit en effet développer une capacité excédentaire pour traverser des périodes de mauvaises conditions météorologiques, tandis que le système flexible peut utiliser pendant ces périodes du gaz ou un carburant synthétique neutre en carbone.  L’intégration de l’ensemble de ces solutions énergétiques permettront à terme un accès à l’électricité au plus grand nombre tout en réduisant les coûts de production du KWh et en améliorant la fiabilité du système énergétique.   

De nombreux scénarios sont envisageables quant à l’avenir énergétique de l’Afrique, cependant les choix politiques doivent emmener les pays vers des solutions durables et inclusives pour accélérer le développement social, industriel et économique. Les nouvelles technologies, le dynamisme du secteur énergétique africain, et la demande croissante soutenue à long terme, sont autant de points positifs pour le développement d’un système énergétique fiable dans de nombreux pays africains.

A propos des auteurs :

Frédéric Baralon et Tarik Sfendla sont Market Development Managers chez Wärtsilä Energy Business. Ils sont en charge des relations avec les différentes parties prenantes du domaine de l’énergie  en Afrique, du suivi de l’évolution du marché et de la modélisation du marché de l’électricité pour optimiser les capacités supplémentaires et les LCOE. Avec leur équipe, ils jouent un rôle clé dans le développement des stratégies Energy Business en Afrique telles que l’évaluation du potentiel de nouveaux marchés et le développement de partenariats stratégiques dans la région.